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de la nécessité de délaisser les avis des Imams lorsque ceux-ci sont en contradiction avec la Sunna du Prophète

Cheikh Muhammad Nasiruddine El-Albani

Traduit par Abu Talha

 

Note du traducteur :

Ceci est l'introduction à l'excellent ouvrage du Cheikh El-Albani "Sifat Salat En-Nabi" ou description de la prière du Prophète (SBDL). Introduction dans laquelle il explique la méthodologie qu'il a suivie, à savoir suivre les hadiths authentiques et délaisser les paroles des Imams quand elles sont en contradiction avec la Sunna du Prophète (SBDL). Il a su démontré dans ces quelques pages que l'imitation aveugle des Imams est quelque chose de réprouvé par l'Islam, et que les 4 Imams eux-mêmes ont interdit de faire.

Pour la traduction, je me suis basé sur la seconde nouvelle édition de "Maktabat el Ma'arif" qui est la plus récente à ma connaissance.

Qu'Allah récompense donc le vénérable Cheikh pour le travail qu'il a fourni pour la revivification et la purification de la Sunna du Prophète (SBDL). Amin.

 

CITATIONS DES QUATRE IMAMS :

Voici quelques-unes des paroles des quatre Imams (Abu Hanifa, Malik, Shafi’i et Ahmed ibn Hanbal) à ce sujet. Peut-être cela sera-t-il un rappel pour ceux qui les imitent aveuglément (1), comme si leurs paroles descendaient du ciel, alors qu’Allah (SWT) dit dans le Coran : " Suivez ce qui vous a été révélé de votre Seigneur et ne suivez pas d’autres alliés que Lui. Mais vous vous souvenez peu ! " (Sourate 7, verset 3).

A-L’IMAM ABU HANIFA (Qu’Allah lui fasse miséricorde) :

    Le premier d’entre eux est l’Imam Abu Hanifa An-Nu’man ibn Thabit (RA). Plusieurs de ses élèves ont rapporté de lui diverses paroles, chacune d’elles menant à une même réalité : l’obligation d’adopter le hadith et de délaisser les opinions des Imams en désaccord avec la Sunna :

      1. " Si le hadith est authentique alors c’est mon opinion(2) "
      2. " Il n’est pas permis à une personne d’adopter notre opinion sans savoir d’où nous l’avons tirée(3) " Dans une autre version : " Il est interdit à toute personne ne connaissant pas mes preuves (dalils) de juger selon mon opinion ". Il est ajouté dans une autre version : " […] car nous sommes des êtres humains, nous émettons un avis aujourd’hui et nous changeons demain ". Et dans une autre version : " Malheur à toi, ô Ya’koub ! (il s’agit d’Abu Yusuf , le meilleur élève d’Abu Hanifa). N’écris pas de moi tout ce que tu entends, car je peux avoir un avis aujourd’hui et le délaisser demain, de même que je peux avoir une opinion demain et la délaisser après-demain(4) "
      3. " Si j’ai dit une parole en désaccord avec le Coran et la Sunna alors délaissez ma parole(5) "

    B- L’IMAM MALIK IBN ANAS (Qu’Allah lui fasse miséricorde) :

      1. " Je suis un être humain qui peut se tromper comme il peut avoir juste. Etudiez donc mes opinions : adoptez tout ce qui est en accord avec le Coran et la Sunna, et rejetez tout ce qui est en désaccord avec eux deux (6) "
      2. " Il n’existe personne après le Prophète (SAW) sans que ses opinions puissent être acceptées ou rejetées, sauf le Prophète (SAW)(7) "
      3. Ibn Wahb a dit : " J’ai entendu Malik répondre à une question à propos du fait de se laver l’espace entre les doigts de pieds pendant les ablutions. Celui-ci répondit : cela n’est pas nécessaire. J’attendis alors jusqu’à ce qu’il ne reste plus grand monde autour de lui, puis je lui dis : pour nous, cela est une Sunna. Il me répondit : et quelle est-elle ? Je lui dis : El-Layth ibn Sa’d, ibn Luhay’a et ‘Amru ibn El-Harith m’ont rapporté d’après Yazid ibn ‘Amru El-Ma’afiri d’après Abu Abderrahmane El-Halabi d’après El-Mustawrid ibn Shaddad El-Qorachi qu’il a dit : j’ai vu le Prophète (SAW) frotter l’espace entre ses doigts de pieds avec son auriculaire. L’Imam Malik me dit alors : ce hadith a une bonne chaîne de transmission et jamais je ne l’avais entendu auparavant, si ce n’est aujourd’hui.

        Plus tard, j’entendis Malik répondre à cette question en ordonnant de se laver entre les doigts de pieds.(8) "

    C- L’IMAM SHAFI’I (Qu’Allah lui fasse miséricorde) :

    Quant à l’Imam Shafi’i, il a été rapporté de lui des paroles plus nombreuses et plus belles (9), et ces élèves sont ceux qui les ont le plus mises en application et en sont donc devenus plus heureux. Parmi ses paroles :

      1. " Il n’est pas une personne sans qu’une Sunna du Prophète ne lui échappe ou ne lui parvienne. Alors quel que soit l’avis que j’émets, ou quelle que soit la règle que j’énonce, s’il existe une Sunna du Prophète (SAW) qui contredit ma parole, il faut alors revenir à la parole du Prophète (SAW) que j’adopte moi-même (10) "
      2. " Les musulmans se sont tous mis d’accord pour dire que toute personne à qui il apparaît une Sunna du Prophète (SAW), il lui est interdit de la délaisser pour la parole d’autrui (11) "
      3. " Si vous trouvez dans mon livre une contradiction avec la Sunna du Prophète (SAW), adoptez alors la Sunna du Prophète (SAW), et abandonnez mes paroles " Et dans une autre version : " Suivez la Sunna du Prophète (SAW) et n’accordez après elle aucune importance aux paroles des hommes, quels qu’ils soient (12) "
      4. " Si le hadith est authentique, alors c’est mon opinion (13) "
      5. " Vous êtes plus savant dans le hadith et la connaissance des rapporteurs de hadiths que moi. Si donc vous avez un hadith authentique, faites-le moi savoir, quelle que soit son origine : de Koufa, de Basra ou du Sham, afin que je l’adopte s’il est authentique (14) "
      6. " S’il existe un hadith authentique chez les savants du hadith à propos d’une question juridique en désaccord avec mon avis, alors j’adopte le hadith de mon vivant et après ma mort (15) "
      7. " Si vous me voyez dire une parole alors qu’il existe un hadith authentique contredisant ma parole, sachez que j’ai perdu la raison (16) "
      8. " Si dans tout ce que je dis, il existe un hadith authentique qui me contredit, alors le hadith du Prophète (SAW) est plus en droit d’être suivi , ne m’imitez donc pas (17) "
      9. " Tout hadith du Prophète est mon avis, même si vous ne l’avez pas entendu de moi (18) "

    D- L’IMAM AHMAD IBN HANBAL (Qu’Allah lui fasse miséricorde) :

    Quant à l’Imam Ahmad, il est celui qui a rassemblé le plus de hadiths parmi les quatres Imams, et celui qui s’y accrochait le plus à tel point qu’ " il détestait qu’on écrive des livres basés sur la déduction et l’opinion "(19). C’est pourquoi il a dit :

      1. " N’imite ni moi, ni Malik, ni Shafi’i, ni El-Awza’i, ni Thawri, mais prends d’où ils ont pris "(20) Dans une autre version : " N’imite personne dans la religion parmi ces hommes. Ce qui vient du Prophète (SAW) et ses Compagnons, prends- le, puis prends de ceux qui ont suivi, parmi lesquels tu as le choix " Dans une autre version : " Le suivi consiste à suivre tout ce qui vient du Prophète (SAW) et ses Compagnons, après eux on a le choix parmi les Suivants "(21)
      2. " L’opinion de El-Awza’i, l’opinion de Malik, l’opinion de Abu Hanifa ne sont que des opinions qui sont égales à mes yeux, mais la preuve réside dans les hadiths "(22)
      3. " Celui qui rejette un hadith du Prophète (SAW) est au bord de la perdition "(23)

    Voilà donc les paroles des quatre Imams (qu’Allah les agrée) en ce qui concerne l’ordre qu’ils ont donné de s’accrocher aux hadiths et leur interdiction de les imiter aveuglément sans réfléchir. Ces paroles sont tellement claires qu’elles ne peuvent accepter quelque contestation ou interprétation. Partant de cela, une personne qui s’accroche à tout ce qui est authentique dans la Sunna du Prophète (SAW), même si c’est en désaccord avec les avis des quatre Imams, ne sera pas sorti de leur école, ni ne les aura contredit, bien au contraire ! Il sera celui qui les suit le plus fidèlement, et se sera accroché à l’anse ferme et indissociable [El ‘Urwatul-Wuthqa] . Tandis que celui qui délaisse une Sunna authentique car elle est en désaccord avec les avis des Imams, celui-là en fait leur a désobéi, et a contredit leurs paroles citées plus haut, alors qu’Allah (SWT) dit : " Non ! Par ton Seigneur ! Ils ne seront pas parfaitement croyant tant qu’ils ne te prendront pas comme juge de leurs différents, et qu’ensuite ils ne ressentent aucune déconvenue en leur for intérieur à propos de ta décision, et tant qu’ils ne se soumettront pas totalement " (Sourate 4, verset 65). Allah dit aussi : " Que prenne garde ceux qui sont en désaccord avec ses ordres, peut-être Allah leur fera-t-il subir une épreuve ou un châtiment douloureux " (Sourate 24, verset 63).

    El-Hafidh ibn Radjab a dit : " Il est obligatoire pour toute personne à qui est parvenu un hadith du Prophète (SAW) dont il a compris le sens, de le faire savoir à la communauté, de la conseiller de l’appliquer, et de leur ordonner de suivre l’ordre du Prophète (SAW), même s’il est en désaccord avec un grand Imam respecté de cette communauté, car l’ordre du Prophète (SAW) est plus en droit d’être respecté et suivi que l’opinion de tout grand Savant en désaccord (involontairement) avec l’ordre du Prophète (SAW) dans certaines choses. C’est pourquoi beaucoup de Compagnons, ainsi que la génération des Suivants, ont rejeté toute personne contredisant un hadith authentique, et parfois même ont été durs dans le rejet,(24) non pas par haine contre la personne, au contraire ! Cette personne peut être chère à leur cœur et respectée dans leur conscience, mais le Prophète (SAW) est plus cher à leur cœur, et son ordre est au-dessus de l’ordre de toute créature. Si donc l’ordre du Prophète (SAW) et l’ordre d’Untel se contredisent, l’ordre du Prophète (SAW) est plus à même d’être mis en avant et suivi, et cela n’empêche pas de respecter celui qui a émis un avis involontairement en désaccord avec l’ordre du Prophète (SAW), car cela lui est pardonné(25). Mieux encore, ce savant en désaccord avec le hadith par erreur n’aurait eu aucune rancœur qu’on ne lui suive pas s’il lui était apparu que le hadith du Prophète (SAW) le contredisait ".(26)

    J’ajoute : comment les Imams pourraient-ils en avoir quelque rancœur alors qu’ils l’ont ordonné à leurs élèves, comme vu plus haut, et les ont obligés à délaisser leurs dires s’ils sont en désaccord avec la Sunna ? L’Imam Shafi’i est même allé jusqu’à ordonner à ses élèves et disciples de considérer les paroles du Prophète (SAW) comme ses avis juridiques, même s’il (Shafi’i) ne les avaient pas dits, ou qu’il avait jugé de façon différente. C’est la raison pour laquelle le Savant Ibn Daqiq El-Id, lorsqu’il a rassemblé toutes les questions sur lesquelles chacune des quatre écoles était en désaccord avec les hadiths authentiques dans un seul gros volume, dit : " Le fait d’attribuer ses jugements aux Imams est interdit (haram), il est donc obligatoire pour les juristes imitateurs de les connaître afin de ne pas les leur attribuer, car ce serait un mensonge à leur sujet "(27)


    QUELQUES EXEMPLES DE SAVANTS AYANT DELAISSE L'AVIS DE LEUR ECOLE POUR SUIVRE LA SUNNA :

    Pour toutes les raisons citées plus haut, des savants de différentes écoles — " Un grand nombre parmi les premiers, un petit nombre parmi les derniers " (sourate 56, verset 13-14) — ne suivaient pas leurs Imams dans tout ce qu’ils émettaient comme opinions ; ils en ont même délaissé beaucoup lorsqu’il leur apparaissait qu’elles étaient en désaccord avec la Sunna. A tel point que les deux grands savants Hanafites, élèves de Abu Hanifa, Muhammad ibn-ul-Hassan et Abu Yussuf (Qu’Allah leur fasse miséricorde) ont été en désaccord avec leur Cheikh sur environ un tiers de toutes ses opinions juridiques,(28) et les livres de jurisprudence hanafite sont autant de preuves sur la véracité de ces propos. Il peut être dit la même chose de l’Imam El-Muzni(29) et bien d’autres parmi les élèves de Shafi’i ou d’autres Imams, et s’il fallait donner des exemples pour chacun d’eux , ce serait d’une longueur excessive, et nous sortirions alors de notre but qui est d’être bref dans cette recherche. C’est pourquoi nous nous contenterons de deux exemples seulement :

      1. L’Imam Muhammad ibn-ul-Hassan a dit dans son Muwatta(30)(p.158) : " Quant à Abu Hanifa (Qu’Allah l’agrée), il jugeait qu’il n’y avait pas de prière lorsque l’on invoquait Allah pour qu’il fasse descendre la pluie. Quant à nous, nous jugeons que l’Imam doit diriger une prière de deux inclinaisons, puis invoque Allah en retournant son manteau ".
      2. ‘Isam ibn Yusuf El-Balakhi était parmi les proches de l’Imam Muhammad ibn-ul-Hassan(31) et parmi les fidèles de l’Imam Abu Yusuf(32) . " Il lui arrivait souvent de juger selon un avis contraire à Abu Hanifa, car ce dernier ne connaissait pas la preuve (dalil). Quant à ‘Isam, il jugeait différemment lorsqu’une preuve puissante d’un autre Imam lui parvenait "(33). C’est pourquoi " il levait les mains avant l’inclinaison et lorsqu’il s’en relevait "(34) comme cela est connu dans la Sunna, selon des dizaines de chaînes de transmission différentes authentiques jusqu’au Prophète (SAW). Et le fait que ses trois Maîtres (Abu Hanifa, Muhammad ibn-ul-Hassan, Abu Yusuf) aient jugé différemment de la Sunna ne l’a pas empêché de l’appliquée… et c’est ainsi que tout musulman doit être, appuyé par les paroles des quatre Imams et d’autres, comme nous l’avons vu.



    FAUX ARGUMENTS ET REPONSES :

    Voilà donc ce que j’avais écrit il y a de cela dix ans, en introduction à ce livre [Sifat Salat En-Nabi]. Il nous est apparu dans ce laps de temps que cette introduction a eu des conséquences bénéfiques dans les rangs de la jeunesse musulmane, car elle les a dirigés vers la nécessité de retourner à la source pure de l’Islam que sont le Coran et la Sunna dans tout ce qui concerne leur religion et leur adoration. Car le nombre de jeunes appliquant la Sunna et adorant Allah à travers elle n’a cessé d’augmenter – La louange est à Allah – à tel point qu’ils sont aujourd’hui reconnus pour cela.

    Cependant j’ai ressenti chez quelques-uns parmi eux une certaine réticence quant au fait de s’élancer dans son application. Non parce qu’ils doutent de la nécessité de l’appliquer après toutes les preuves citées, tirées des versets du Coran et des paroles des Imams, ordonnant de revenir à la Sunna, mais à cause d’arguments spécieux et fallacieux qu’ils entendent de certains Cheikhs imitateurs. C’est pourquoi j’ai ressenti la nécessité de citer ces arguments et d’y répondre, peut-être que cette partie de la jeunesse s’élancera dans l’application de la Sunna avec ceux qui l’appliquent déjà, afin d’appartenir au Groupe Sauvé, si Allah le veut.

  1. Certains disent : " il n’y a aucun doute sur le fait que revenir à la Tradition du Prophète (SAW) dans tout ce qui concerne notre religion est une chose obligatoire, surtout à propos des adorations pures, sur lesquelles la raison et l’interprétation n’ont pas prise, car ces adorations sont sous décret divin (Tawqifia), comme la prière par exemple. Cependant nous n’entendons aucun des Cheikhs imitateurs des quatre Ecoles ordonner cela, bien au contraire ! Ils reconnaissent plutôt la divergence, et ils prétendent que c’est une facilité pour la communauté, et ils appuient leurs dires par un hadith qu’ils ne cessent de répéter dans ce genre d’occasions en réponse aux défenseurs de la Sunna : " La divergence de ma communauté est une miséricorde ". Il nous apparaît donc que ce hadith contredit la méthode à laquelle vous appelez, méthode à partir de laquelle vous avez publié vos livres, et la Description de la prière du Prophète (SAW) en particulier. Quel est donc votre réponse à propos de ce hadith ?"

    Je répondrai à la question en deux étapes :

    La première est que le hadith n’est pas authentique, il est même faux et n’a aucune source. L’Imam Es-Subki a dit : " Je ne lui ai trouvé aucune chaîne de transmission faible ou même inventé ". Mais il a été rapporté sous la forme : " La divergence de mes Compagnons est pour vous une miséricorde ", " Mes Compagnons sont comme des étoiles. Suivez n’importe lequel d’entre eux et vous serez guidés ". Cependant, aucune des deux versions n’est authentique. La première est très faible, l’autre est forgée de toutes pièces. J’ai développé cela dans Silsilat-ul-Ahadith Ed-Da’ifati wal Mawdu’a (n°58,59,61).

    La seconde est que le hadith, en plus de sa faiblesse, est en contradiction avec le Saint Coran car les versets concernant l’interdiction de diverger dans la religion, et l’ordre de se mettre d’accord à son sujet sont tellement connus qu’on pourrait se passer de les citer. Mais il n’y a pas de mal à en rappeler quelques-uns comme exemples : Allah dit : " Et ne divergez pas car vous perdriez courage et votre ardeur s’en irait à jamais " (Sourate 8, verset 46). Et Il dit aussi : " Et ne soyez pas parmi les associateurs. Parmi ceux qui se sont divisés dans la religion jusqu’à être plusieurs clans, chaque parti étant content de ce qu’il a " (Sourate 30, versets 31-32). Dans un autre verset : " Et ils ne cesseront de diverger, sauf ceux à qui Allah accorde sa Miséricorde " (Sourate 11, versets 118-119). Mais si donc Allah fait miséricorde à ceux qui ne divergent pas – car se sont les gens du Faux qui divergent – comment peut-il être raisonnable de penser que la divergence est une miséricorde ? On voit donc bien que ce hadith n’est pas authentique, ni dans sa chaîne de transmission, ni dans son texte lui-même(35). A partir de là, il n’est pas permis de le prendre comme argument pour ne pas appliquer le Coran et la Sunna comme l’ont ordonné les Imams.

  2. D'autres ont dit : si la divergence dans la religion n’est pas permise, comment expliquez-vous alors la divergence des Compagnons et des Imams après eux ? Et y a-t-il une différence entre leur divergence et celle de certains contemporains ?

    Réponse : oui, il y a une grande différence entre les deux divergences, et ce sur deux points. Le premier : la cause, le second : la conséquence.

    Pour ce qui est de la divergence des Compagnons, elle était nécessaire et naturelle dans la compréhension, non pas par intention volontaire de divergence. Ajoutons à cela qu’il existait d’autres conditions à leur époque, qui ont eu pour conséquence nécessaire leur divergence, conditions qui ont disparues par la suite (36). En outre, on ne peut se débarrasser totalement de ce genre de divergence, et les personnes divergeant de la sorte ne font pas partie de ceux qu’Allah a blâmés dans les versets précédents, car la condition de blâme n’a pas été remplie, à savoir le fait de diverger volontairement et consciemment. Quant à la divergence des imitateurs, elle ne peut être excusée dans la plupart des cas, car il en est certains parmi eux à qui il apparaît la preuve du Coran et de la Sunna, mais cette preuve appuie l’opinion de l’autre Ecole à laquelle ils n’appartiennent pas. Ils délaissent alors cette preuve pour la seule raison qu’elle est en désaccord avec leur Ecole, comme si l’Ecole était le fondement ou la religion avec laquelle le Prophète (SAW) a été envoyé, et l’autre Ecole une autre religion abrogée … !

    D’autres parmi eux sont à l’opposé de cela, car ils considèrent ces Ecoles – malgré les grandes différences entre elles – comme autant de dogmes révélés différents, comme l’a déclaré un de leurs contemporains (37): il n’y a pas de mal à ce que le musulman prenne l’avis de n’importe quelle Ecole et délaisse l’avis de n’importe quelle Ecole, car chacune d’elle fait partie de la religion révélée ! Et il se peut qu’ils se basent sur le hadith faux : " La divergence de ma communauté est une miséricorde " afin d’étayer leur argumentation, et combien de fois les avons nous entendus le clamer haut et fort…

    Parmi eux, certains expliqueront ce hadith par le fait que miséricorde signifie facilité et souplesse pour la communauté ! Et malgré le fait que cet argument est dans tous les cas en contradiction avec les versets clairs cités précédemment, certains parmi les grands Imams l’ont réfuté : Ibn-ul-Qasim a dit : " J’ai entendu Malik et El-Layth dire à propos de la divergence des Compagnons du Prophète (SAW) : " ce n’est pas une "facilité et souplesse" comme le disent les gens ; ce n’est pas du tout cela, mais c’était plutôt justesse ou erreur ". "(38) Et Achhab a dit : " On a posé la question à Malik à propos d’une personne qui entend de la part d’une personne de confiance des propos portant sur les jugements des Compagnons [peut-il choisir à son aise] étant donné que c’est une facilité ? Il répondit : non ! Par Allah ! Jusqu’à ce qu’il trouve la vérité. La vérité n’est qu’une, deux jugements opposés qui seraient justes tous deux ? La vérité et la justesse sont uniques. "(39)

    El-Muzni, disciple de Shafi’i, a dit : " Les Compagnons du Prophète ont divergé et il arrivait qu’ils considèrent que les autres s’étaient trompés. Or, si chacune de leurs opinions avait été juste à leurs yeux, ils ne se seraient pas comportés de la sorte. C’est pourquoi Umar ibn-ul-Khattab (Qu’Allah l’agrée) se mit en colère lorsque Ubey ibn Ka’b et Ibn Mas’ud divergèrent au sujet de la prière dans un habit fait d’une seule pièce. Ubey affirmait que c’était une belle et bonne chose, alors qu’Ibn Mas’ud disait que cela n’était permis que lorsque les vêtements manquaient. Umar sortit alors en colère en disant : deux hommes parmi les Compagnons du Prophète (SAW) ont divergé alors que c’est vers eux que les regards se dirigent, et d’eux que les gens prennent leur religion… Cependant Ubey avait raison et Ibn Mas’ud avait tort. Mais la prochaine fois que j’entends deux personnes diverger à ce propos, qu’ils s’attendent à ce que je les corrige ! ".(40)

    L’Imam El-Muzni a aussi dit : " Nous disons à celui qui permet la divergence, et qui prétend que si deux savants font leur effort de jugement et de recherche (Idjtihad) à propos d’une question, que l’un d’eux dise : c’est permis, que l’autre dise : c’est interdit, alors chacun d’eux dans son effort (Idjtihad) a trouvé la vérité, nous lui disons : dis-tu cela en te basant sur un fondement de la religion ou par analogie ? S’il dit : en me basant sur un fondement, nous lui répondons : comment te bases-tu sur un fondement alors que celui-ci (c.-à-d le Coran) réfute la divergence. Si alors il dit : par analogie, nous lui disons : étant donné que les fondements réfutent la divergence, comment te serait-il permis d’utiliser une analogie pour accepter la divergence ? Aucune personne douée de raison ne le permettrait, que dire alors d’un savant ? ! ".(41)

    Maintenant, si une personne s’écrie : ce que tu as dit à propos de l’Imam Malik – sur le fait que la vérité n’est qu’une et ne peut être multiple – contredit ce qui est relaté dans le livre El-Madkhal-ul-Fiqhi (V.1, p.89) du professeur Zarqa : " Le calife Abu Dja’far El-Mansur et son successeur Harun Er-Rachid eurent le grand désir de choisir l’Ecole Malikite et le livre El-Muwatta comme loi juridique de la dynastie Abbasside. Mais Malik le leur interdit en disant : " Les Compagnons du Prophète (SAW) ont divergé à propos de la jurisprudence et se sont éparpillés dans les contrées, et chacun d’eux avait raison ". " .

    Je réponds : cette histoire est connue et célèbre à propos de l’Imam Malik (qu’Allah l’agrée). Cependant, la dernière phrase : " et chacun d’eux avait raison " fait partie des paroles dont je n’ai jamais trouvé la source dans aucune des versions et aucun des livres qu’il m’a été donné de rencontrer (42) , si ce n’est une seule version rapportée par Abu Nu’aym dans El-Hulia (V.6, p.332) avec une chaîne de transmission comportant El-Miqdam ibn Dawud, que Dhahabi a classé parmi les rapporteurs faibles. Malgré cela, cette version comporte la dernière phrase mais sous la forme : " et chacun d’eux à ses yeux avait raison ". Ce qui prouve que la version de El-Madkhal-ul-Fiqhi est viciée. Et comment ne le serait-elle pas alors qu’elle contredit ce qui a été rapporté de l’Imam Malik par des rapporteurs sûrs que la vérité n’est qu’une et ne peut être multiple comme nous l’avons montré, ainsi que le disaient les Compagnons, les Suivants, les quatre Imams et les autres.

    Ibn Abd-il-Bar a dit (V.2, p.88) : " Si la vérité pouvait exister dans deux jugements contradictoires, jamais un Compagnon n’aurait considéré l’autre comme ayant fait une erreur dans ses avis ou jugements. Et la raison nous interdit de croire qu’une chose et son contraire puissent être juste en même temps. Et quelle juste parole que celle du poète qui s’écria :

    Affirmer la coexistence de deux contraires sous le même rapport

    Est la chose la plus stupide, parmi les choses impossibles "

    Mais quelqu’un dira : si la parole attribuée à l’Imam Malik est effectivement fausse, comment expliquer alors qu’il ait refusé que les gens se rassemblent derrière son Muwatta par ordre du calife El-Mansur ?

    Je réponds : la meilleure narration que j’ai pu trouver est celle qu’Ibn Kathir a rapportée dans Sharhu-Khtisari ‘Ulum-il-Hadith (p.31), narration nous informant que l’Imam Malik a donné la raison suivante : " Certaines personnes ont rassemblé et pris connaissance de choses que nous n’avons pas eu l’occasion de connaître ". Et cela est une preuve de la perfection de sa science et de sa justice, comme l’a dit Ibn Kathir.

    Ainsi donc toute divergence est un mal, et non une miséricorde. Cependant, certaines divergences sont blâmables, comme la divergence des fanatiques des Ecoles, et d’autres sont pardonnables comme celle des Compagnons et des Imams après eux… qu’Allah nous accepte dans leurs rangs et nous aide à les suivre . Il apparaît donc clairement que la divergence des Compagnons est différente de celle des imitateurs, et pour résumer :

    Les Compagnons ont divergé par nécessité, mais ils détestaient la divergence et la fuyaient autant que possible. Quant aux imitateurs, malgré la possibilité de se débarrasser des divergences dans une grande partie des questions juridiques, ils ne se mettent pas d’accord et ne font pas l’effort pour effacer ces divergences. Bien plus : ils l’approuvent ! Quel fossé entre les deux divergences….

    Voilà pour ce qui est de la cause.

    Du point de vue de la conséquence, c’est encore plus clair. Car les Compagnons, malgré leurs divergences connues sur les questions juridiques, faisaient tout leur possible pour sauvegarder l’union et l’entente, et étaient très éloignés de tout ce qui pouvait diviser les rangs. Aussi y en avait-il parmi eux qui voyaient le caractère légitime de dire la Besmala à voix haute, d’autres ne le voyaient pas. Certains d’entre eux étaient convaincus du caractère recommandable de lever les mains pendant la prière, d’autres non. Certains croyaient en l’annulation des ablutions si l’on touche une femme, d’autres ne le voyaient pas de cet œil. Et malgré cela, ils priaient tous derrière le même Imam, et aucun d’entre eux ne refusait de prier derrière Untel car il n’était pas de son avis sur une question juridique. Quant aux imitateurs, leurs divergences sont totalement opposées à celle des Compagnons ! Ce qui a eu pour conséquence que les musulmans ont divergé sur le plus grand pilier après l’attestation de foi qu’est la prière. C’est pourquoi ils refusent de prier tous ensemble derrière un seul Imam, à cause du fait que la prière de l’Imam est annulée, ou détestable tout au moins aux yeux d’une personne d’une autre Ecole…et cela nous l’avons entendu et vu comme d’autres l’ont vu (43). Mais cela n’est pas étonnant, sachant que certains livres de jurisprudence des Ecoles ont mentionné le caractère nul ou détestable de la prière derrière un Imam d’une autre Ecole, ce qui a eu pour conséquence que tu trouves quatre Mihrabs dans une seule mosquée, quatre Imams dirigeant la même prière à tour de rôle, et que tu voies des gens attendant leur Imam pendant que l’autre est debout en train de prier !

    Pire que cela, la divergence est arrivée à un degré tel chez certains imitateurs, qu’il fut un temps où le Hanafite ne pouvait se marier avec la Shafi’ite, jusqu’à l’arrivée d’un célèbre Hanafite, surnommé Mufti Thaqaleyn (le Mufti des Hommes et des Djinns) qui a rendu licite ledit mariage, car la Shafi’ite pouvait être " comparée à une femme des Gens du Livre (Juifs et Chrétiens) " !(44) Et par conséquent, il n’est pas permis le contraire, à savoir le mariage d’un Shafi’ite avec une Hanafite, de la même façon qu’il n’est pas permis à un Juif ou Chrétien d’épouser une musulmane ! ?

    Ces deux exemples parmi tant d’autres clarifient à toute personne raisonnable les conséquences néfastes de la divergence des contemporains et leur entêtement à son sujet. En revanche, celle des Anciens (Salaf) n’avait aucune mauvaise influence sur la communauté. C’est pourquoi ils sont loin d’être concernés par les versets interdisant la divergence dans la religion, à l’opposé des contemporains, qu’Allah nous guide vers le droit chemin.

    Mais si au moins le mal engendré par leur divergence s’était limité à leur milieu et ne s’était pas transmis au-delà de la communauté musulmane…dans ce cas le problème en aurait été allégé. Cependant – et quel malheur ! – cela s’est même transmis chez les mécréants dans beaucoup de contrées et de pays, ce qui les a empêchés d’entrer dans l’Islam ! L’illustre professeur Muhammad El-Ghazali a dit dans son livre Dhalamun min El-Gherb (L’obscurité de l’Occident, p.200) : " Une question a été posée lors d’une conférence organisée à Brinston aux Etats-Unis, question qui est souvent posée dans le milieu des orientalistes et islamologues : quels sont les enseignements que proposent les musulmans au monde, afin de définir l’Islam auquel ils appellent ? Sont-ce les enseignements de l’Islam tels que les comprennent les Sunnites ? Ou tels que les comprennent les Chiites Imamites ou Zeydites ? Tout en sachant que chacun de ces groupes comporte lui-même des divisions. Et il se peut que certains d’entre eux abordent une question avec un esprit moderniste mais limité, tandis que d’autres l’aborderont avec un esprit traditionnel et sévère. Dans tous les cas, ceux qui appellent à l’Islam laissent leurs auditeurs dans un désarroi total, car ils sont eux-mêmes dans le désarroi. ".(45)

    De même, on trouve dans l’introduction au livre Hadyatus-Sultane ila muslimi biladil Jabane (Présent de Sultane offert aux musulmans du Japon) du grand Savant Muhammad Sultane El-Ma’sumi (Qu’Allah lui fasse miséricorde) ce qui suit : " Une question m’avait été posée par les musulmans du Japon, originaire de Tokyo et Osaka, qui est la suivante : qu’est-ce qu’en réalité que la religion musulmane ? Et que signifie l’Ecole ? Est-il nécessaire pour une personne ayant l’honneur de devenir musulmane de suivre une des quatre Ecoles ? C’est-à-dire d’être Malikite, Hanafite, Shafi’ite, ou autre chose, ou n’est-ce pas nécessaire ? Car une grande discorde est née au Japon, et une division abjecte s’est développée, le jour où plusieurs Japonais à l’esprit ouvert ont décidé de devenir musulmans et de s’orner de la fierté de la foi, décision qu’ils ont déclarée à l’association musulmane de Tokyo, dont certains Indiens ont dit : il faut qu’ils choisissent l’Ecole de l’Imam Abu Hanifa, car il est la lumière qui guide la communauté. Mais des Indonésiens rétorquèrent : il faut qu’ils soient tous Shafi’ites !

    Lorsque ces Japonais entendirent ces paroles, ils s’en étonnèrent beaucoup et restèrent désemparés… et c’est ainsi que la question des Ecoles devint une barrière à leur conversion ! ".

    3- Certains prétendent que notre invitation à suivre la Sunna et à délaisser l’opinion des Imams en désaccord avec elle signifie le délaissement total de leurs enseignements et du profit que l’on peut tirer de leurs opinions et efforts d’interprétation.

    Ce à quoi je réponds : rien ne peut être plus éloigné de la droiture que cette allégation. Elle est même fausse, clairement fausse, comme cela apparaît très distinctement dans les dires précédents qui témoignent du contraire.

    En effet, notre appel consiste seulement à ne plus considérer les Ecoles comme des religions, et de les élever au niveau du Coran et de la Sunna, à tel point que c’est aux opinions de ces Ecoles que l’on revienne lorsqu’il apparaît un point de désaccord, ou pour déduire des règles issues de situations nouvelles, ou d’événements imprévus, comme le font les juristes aujourd’hui. C’est ainsi qu’ils ont imposé de nouvelles règles en ce qui concerne la vie sociale, le mariage et le divorce, et d’autres choses encore, sans revenir pour cela au Coran et à la Sunna pour différencier les règles justes des règles erronées, et le vrai du faux… mais plutôt selon l’adage : " La divergence est une miséricorde " ! Et afin de rechercher la facilité et le bienfait comme ils le prétendent. Mais quelle belle parole que celle de Suleyman Et-Teïmi (qu’Allah l’agrée) : " Si tu recherches les facilités de chaque savant, tout le mal se sera rassemblé en toi " rapporté par Ibn Abd-il-Bar (V.2, p.91-92) qui a dit à ce propos : " Ceci est un consensus à propos duquel je ne connais aucune divergence ".

    Et c’est cela que nous dénigrons, en accord avec le consensus des savants comme tu peux le voir.

    Par contre, le fait de revenir à leur paroles, d’en tirer profit, de s’en aider pour définir la bonne opinion parmi les avis dans les questions sur lesquelles il n’y a pas de texte dans le Coran et la Sunna, ou les problèmes cités dans les textes mais qui ont besoin d’éclaircissement, cela est une chose que nous ne dénigrons pas. Au contraire, nous l’ordonnons et incitons à le faire, car le profit en est espéré pour toute personne qui prend comme méthode la voie du Coran et de la Sunna.

    L’illustre savant Ibn Abd-il-Bar (qu’Allah l’agrée) a dit (V.2, p.172) :

    " Je te conseille, ô mon frère, d’apprendre les bases et de t’en préoccuper. Et sache que toute personne qui se préoccupe de la Sunna et des règles citées dans le Coran, qui scrute les avis des juristes, qui s’en fait une aide dans ses efforts d’interprétation, une clé pour les voies de l’observation, une explication pour l’ensemble des Sunnas qui peuvent accepter plusieurs interprétations, sans imiter ces juristes comme on imite la Sunna du Prophète (SAW) à laquelle on doit se soumettre dans toutes les situations et sans aucune condition, qui ne s’est pas reposé sur ce que les savants ont dépensé comme efforts dans le but de protéger la Sunna et la comprendre, qui a pris ces derniers comme exemple dans la recherche, la compréhension et l’observation, qui a reconnu leurs efforts et les en a remercié sur ce qu’ils ont apporté et enseigné, qui a fait l’éloge de la justesse de leurs opinions qui est majoritaire, sans pour autant les considérer comme infaillibles de la même façon qu’ils n’ont pas prétendu l’être, c’est celui-là le vrai étudiant qui s’accroche à la voie de nos Pieux Ancêtres (Salafus-Salih), et c’est lui qui atteindra le plus grand bien, qui vise la guidée, qui suit la Sunna du Prophète (SAW) et la voie des Compagnons, qu’Allah les agrée.

    En revanche, celui qui s’éloigne de la recherche, qui délaisse ce que nous avons dit plus haut, qui rejette la Sunna pour sa raison, qui abandonne la recherche profonde à son sujet, le voilà l’égaré et l’égareur ! Mais le pire est encore celui qui ignore tout cela et qui ose s’engager dans la fatwa… il est certes encore plus aveugle , et plus égaré encore !".

    Voilà la vérité, il n’y a pas de doute

    Ne prends pas les sentiers, mais prends plutôt la route

    4- Il y a une autre allégation chez certains imitateurs qui les empêche de suivre la Sunna, lorsqu’il leur est apparu que les Ecoles Juridiques la contredisent : ils prétendent que suivre la Sunna a pour conséquence nécessaire le fait de considérer les Imams dans l’erreur, ce qui est une grave insulte à leurs yeux. Et étant donné qu’insulter un musulman ordinaire est interdit, que dire d’un grand savant ?

    La réponse est la suivante : cette allégation est fausse, et elle est due au manque de connaissance et de compréhension raisonnable de la Sunna. Sinon, comment un musulman pourrait-il dire cela ? Alors que le Prophète (SAW) a dit :  " lorsqu’une personne d’autorité (Savant ou gouverneur) fait un effort de recherche, émet un avis et qu’il trouve juste, il aura deux récompenses. S’il se trompe, il n’en aura qu’une. "(46) Ce hadith rejette donc l’allégation précédente et nous montre clairement que lorsque l’on dit :  " Untel s’est trompé ", cela signifie : " Untel a été récompensé une fois ". Si donc, aux yeux de celui qui les considère s’être trompés, ces Imams sont récompensés, comment peut-on considérer que c’est une insulte à leur égard ? Il n’y a pas de doute que cette pensée est fausse et que toute personne l’ayant acceptée doit s’en éloigner. Car sinon, c’est lui qui insulte les musulmans. Non pas un banal musulman, mais les plus grands Imams parmi les Compagnons, les Suivants, les quatre Imams et les autres ! Car nous savons avec certitude que certains parmi eux considéraient les autres s’être trompés dans telle ou telle question, et vice versa, de même qu’ils rejetaient l’opinion de l’autre. Une personne raisonnable peut-elle se permettre de dire que ces Imams s’insultaient mutuellement ? ! Il est même rapporté de source authentique que le Prophète (SAW) avait considéré Abu Bakr être dans l’erreur quand celui-ci tenta d’interpréter le rêve d’un autre. Le Prophète (SAW) lui dit alors : " Tu as vu juste dans certaines choses, mais t’es trompé dans d’autres "(47) Doit-on alors considérer que le Prophète (SAW) a insulté Abu Bakr ? !

    Et parmi les conséquences étonnantes de cette pensée sur ceux qui l’adoptent, les voilà qui dévient de l’application de la Sunna en désaccord avec leur Ecole. Car le fait de suivre cette Sunna signifie pour eux insulter l’Imam. Par contre, suivre l’Imam, même s’il est en désaccord avec la Sunna signifie son respect et sa vénération ! C’est pourquoi ils insistent dans l’imitation de peur de tomber dans la diffamation.

    Mais ces personnes ont oublié – je ne dirais pas : ont fait semblant d’oublier – qu’à cause de cette pensée ils sont tombés dans une chose plus grave encore que ce qu’ils fuyaient. Car si quelqu’un leur dit : si le fait de suivre est une preuve de respect pour celui que l’on suit, et si le fait de ne pas le suivre est une insulte à son égard, comment vous permettez-vous donc de ne pas suivre le Prophète (SAW) pour suivre l’Imam de votre Ecole lorsque son opinion contredit la Sunna ? Alors que cet Imam n’est pas infaillible [contrairement au Prophète (SAW)] et que l’insulter n’est pas une preuve de mécréance [contrairement au fait d’insulter le Prophète (SAW)] ! Si, alors à vos yeux, ne pas suivre l’Imam est une insulte pour lui, et bien le fait de ne pas suivre le Prophète (SAW) est une insulte encore plus grande à son égard. Pire : c’est la mécréance même, qu’Allah nous en protège.

    Ainsi, si quelqu’un leur avance ces arguments, ils ne pourront lui répondre, si ce n’est par une parole que nous ne cessons d’entendre de la part de certains d’entre eux qui est la suivante : " Nous avons délaissé la Sunna parce que nous avons totalement confiance en l’Imam de notre Ecole, et qu’il connaît mieux la Sunna que nous ".

    Notre réponse à cette parole peut prendre différentes formes, qui seraient longues à expliciter dans cette introduction. C’est pourquoi je me contenterai d’une seule qui sera une réponse sans appel par la volonté d’Allah : il n’y a pas que l’Imam de votre Ecole qui connaît mieux la Sunna que vous. Il y en a des dizaines, des centaines même. Si alors un hadith authentique vient contredire l’opinion de votre Imam, et qu’un autre Imam ait adopté ce hadith, vous êtes donc obligé d’appliquer le hadith, sinon vous seriez en contradiction avec vos propos. En effet, la personne appartenant à l’Ecole dont l’Imam a adopté le hadith va vous dire : " J’ai appliqué ce hadith car j’ai confiance en l’Imam qui l’a adopté. Il est donc nécessaire de suivre cet Imam plutôt que le vôtre qui a contredit le hadith ". Et cela est clair et évident pour tout le monde, si Allah le veut.

    C’est pourquoi je me permets de dire :

    Notre livre [Sifat Salat En-Nabi ou Description de la prière du Prophète], étant donné qu’il rassemble des Sunnas authentiques au sujet de la façon de prier du Prophète (SAW), il ne reste donc plus d’excuse à personne dans le fait de ne pas les appliquer, car il n’en ait aucune parmi elles sur lesquelles les Savants se sont accordés pour délaisser, loin d’eux cette pensée ! En outre, il n’y a pas un élément de ce livre sans qu’une partie des savants ne l’aie adopté. Et ceux parmi eux qui ne l’ont pas adopté sont excusés auprès d’Allah et gratifiés d’une seule récompense, car le hadith ne leur est pas parvenu, ou bien leur est parvenu mais selon une chaîne de transmission sur laquelle on ne peut se baser, ou pour tout autre excuse connue chez les savants. Quant à ceux pour qui le hadith est apparu être authentique après leur Imam, ils n’ont aucune raison de l’imiter. Il est plutôt obligatoire pour eux de suivre le texte infaillible, but de toute cette introduction. Et Allah (SWT) dit : " O vous qui avez cru ! Répondez à l’appel d’Allah et de Son Messager lorsqu’ils vous invite à ce qui vous fait revivre ! Et sachez qu’Allah s’interpose entre l’homme et son cœur et que c’est vers Lui que vous serez rassemblés " (Sourate 8, verset 24).

    Et Allah dit la vérité,et c’est Lui qui guide vers le droit chemin, quel bon Maître et quel bon Secoureur. Qu’Allah bénisse Muhammad, ainsi que sa Famille et ses Compagnons. Et la louange est à Allah, Seigneur des Mondes.

    DAMAS le 28/10/1389 de l’Hégire (Janvier 1970)

    MUHAMMAD NASIRUDDIN EL ALBANI

    NOTES :

    (1) C'est cet aveuglement que l'Imam Tahawi cite lorsqu'il dit : " Personne n'imite si ce n'est un fanatique ou un imbécile " Rapporté par Ibn Abidine dans Rasm-ul-Mufti (réponse 1, p.32). (Retour)

    (2) Rapporté par Ibn Abidine dans El Hachia (V.1, p.63) et dans son livre Rasm-ul-Mufti (V.1, p.4 de Madjmu'atu-rasail ibn Abidine). Rapporté également par le Cheikh Salih El-Fullani dans Iqadh-ul-Himem (p.62). Ibn Abidine rapporte aussi ces paroles tirées de Sharh-ul-Hidaya, ouvrage écrit par Ibn Shahna el Kabir, le maître d'ibn Hammam : " Si le hadith est authentique est qu'il est en désaccord avec l'avis juridique de l'Ecole hanafite, il faut adopter le hadith et cela ne rend pas la personne non-hanafite, car il a été rapporté de source authentique que Abu Hanifa a dit : "Si le hadith est authentique alors c'est mon opinion" ". L'Imam Ibn Abd-il-Bar a aussi rapporté cela d'Abu Hanifa ainsi que d'autres grands Imams.

    J'ajoute : Cela est une preuve de la perfection de leur science et de leur crainte d'Allah (SWT), car ils ont bien souligné ici que la Sunna du Prophète (SAW) ne leur était pas parvenue intégralement. L'Imam Shafi'i l'a aussi reconnu comme on le verra plus loin. Ainsi, il se peut qu'il émane de ces Imams des avis qui ne soient pas en accord avec la Sunna, c'est pourquoi ils nous ont ordonnés de nous accrocher à celle-ci et qu'elle soit considé-rée comme leur opinion (Qu'Allah les accepte tous dans Sa clémence). (Retour)

    (3) Rapporté par Ibn Abd-il-Bar dans El Intiqa fi fadhaili thalathat-il-fuqaha (p.145) et Ibn-ul-Qayim dans I'lam-ul-Muwaqqi'in (V.2, p.309), Ibn Abidine dans El-Hachia (V.6, p.293) et dans Rasm-ul-Mufti (p.29 et 32), Cha'rani dans El-Mizane (V.1, p.55), 'Abbas El-Douri dans d'ibn Mu'ine (V.6, Ch.77, p.1) avec une chaîne de transmission authentique d'après Zafar. Cette parole a aussi été rapportée d'Abu Yusuf et 'Afia ibn Yazid (Voir El-Iqadh p.52) et Ibn-ul-Qayim a affirmé son authenticité d'après Abu Yusuf ( Voir El-I'lam V.2 p.344)

    J'ajoute : Voilà donc leurs dires à propos de celui qui ne connaît pas leurs preuves (dalils). Mais qu'auraient-ils dit alors à propos de ceux qui savent que le hadith est en désaccord avec l'opinion des Imams et qui malgré cela jugent d'après leurs avis ! ? Cet argument suffit à lui seul pour détruire l'imitation aveugle ; c'est pourquoi plusieurs Cheikhs hanafites ont refusé d'attribuer cette parole à Abu Hanifa, car elle les empêchait de juger selon son avis sans connaître ses preuves (dalils) ! (Retour)

    (4) L'Imam Abu Hanifa fait cette remarque car il base souvent ses avis juridiques sur l'analogie (Qyas). Ainsi, il peut lui arriver de considérer que telle analogie est plus puissante, ou qu'un hadith authentique du Prophète (SAW) lui parvienne, ce qui a pour conséquence le délaissement de son avis antérieur. El-Cha'rani a dit dans son ouvrage El-Mizane (V.1, p.62) : " Notre conviction et la conviction de toute personne juste à l'égard de l'Imam Abu Hanifa est que s'il avait vécu jusqu'à ce que la Shari'a (Loi Islamique) ait été mise par écrit et après que les Savants du hadith eurent rassemblé toutes les paroles du Prophète (SAW) éparpillées dans les diverses contrées musulmanes, il aurait sans aucun doute adopté les hadiths et délaissé toutes les analo-gies qu'il avait faites; et l'analogie aurait été rare dans ses jugements, comme elle l'a été dans ceux des autres Imams. Cependant, et étant donné que les éléments et les preuves de la Shari'a étaient éparpillés en son temps chez les Tabi'i (génération succédant aux Compagnons) et leurs successeurs dans les diverses contrées et villes, l'Imam se vit dans l'obligation d'utiliser l'analogie plus souvent que les autres Imams, car il n'avait pas entre les mains de textes concernant les problèmes qui lui étaient posés. Et ce n'est qu'après lui qu'a commencé l'épopée du hadith et de la recherche de l'authentique chez les Savants du hadith, ce qui leur a permis d'avoir tous les textes en main pour répondre aux problèmes sans utiliser l'analogie ". Abul-Hassanate a rapporté une grande partie de ces paroles dans son livre El-Nafi' ul-kabir (p.135) et a ajouté des commentaires pour qui voudrait se pencher plus profondément sur la question.

    J'ajoute : Si cela est l'excuse d'Abu Hanifa en ce qui concerne ses avis en désaccord (involontairement) avec la Sunna - et c'est une excuse valable sans l'ombre d'un doute, car Allah ( SWT) ne charge pas une âme plus que ce qu'elle ne peut supporter - il est donc strictement interdit à toute personne de le rabaisser comme le font certaines personnes ignorantes. Bien au contraire ! Nous lui devons tout notre plus profond respect , car c'est un des plus grands Imams de l'Islam par lequel Allah a protégé cette religion et nous l'a transmise à travers les générations. De plus, l'Imam Abu Hanifa sera récompensé, que son opinion soit juste ou fausse. De la même façon, il est interdit à toute personne le respectant de rester accroché aux opinions de l'Imam en désaccord avec la Sunna, car elle ne font plus partie de ces avis comme il le dit lui-même. Et la vérité est entre ces deux groupes. " Notre Seigneur, pardonne-nous ainsi qu'à nos frères qui nous ont précédés dans la foi et ne mets dans nos cœur aucune rancœur pour ceux qui ont cru. Notre Seigneur Tu es Compatissant et Très Miséricordieux " (sourate 59, verset 10) (Retour)

    (5) Rapporté par El-Fullani dans El-Iqadh (p.50), parole attribuée également à l'Imam Shafi'i. Commentant ces paroles, El-Fullani a dit : " Ces paroles ne concernent pas le Savant Mudjtahid [ Savant ayant atteint un niveau de science et de compréhension tel qu'il soit devenu indépendant des Ecoles ou Madhhab dans la déduction des lois islamiques] , car il n'a pas besoin des avis des Imams. Mais cela concerne plutôt l'imitateur"

    J'ajoute : Cha'rani a dit dans El-Mizane (V.1, p.26) : " Si tu te poses la question : après la mort de l'Imam que j'imite, que faire des hadiths authentiques qu'il n'a pas pu prendre en compte dans ses jugements ? La réponse est : ton devoir est d'adopter ces hadiths, car si l'Imam que tu imites en avait entendu parlé et qu'ils avaient été authentiques à ces yeux, il t'aurait sûrement ordonné de les adopter, car tous les Imams sont prison-niers entre les mains de la Shari'a, et celui qui adopte cette attitude aura récolté le bien à pleines brassées. Quant à celui qui dit : " Je n'applique pas tel hadith tant que mon Imam ne l'a pas appliqué ", qu'il sache qu'il est passé à côté d'un grand bien, comme le font beaucoup d'imitateurs dans les Madhhabs (Ecoles juridiques). Mais il aurait été préférable pour eux d'appliquer tout hadith authentique après le décès de leur Imam par obéissance aux ordres de ce dernier. Car notre conviction à leur sujet est que s'ils avaient vécu le temps d'être en présence des hadiths authentifiés après eux, ils auraient sans aucun doute adopté ces hadiths et les auraient appliqués, de même qu'ils auraient délaissé toutes leurs analogies et paroles en désaccord avec ces hadiths ". (Retour)

    (6) Rapporté par Ibn Abd-il-Bar dans El-Djami' (V.2, p.32) et Ibn Hazm dans Usul-ul-Ahkam (V.6, p.149), ainsi que El-Fullani dans El-Iqadh (p.72) (Retour)

    (7) Cette parole est le plus souvent attribuée à l'Imam Malik. Elle a été authentifiée par Abd-ul-Hadi dans Irshadus-Salik (V.1, p.277) de même qu'elle a été rapportée par Ibn Abd-il-Bar dans El-Djami' (V.2, p.91), Ibn Hazm dans Usul-ul-Ahkam (V.6 p145 et 179) d'après El-Hakam ibn 'Utayba et Mudjahid. Takiud-din Es-Subki l'a aussi rapporté dans El-Fatawa (V.1, p.148) d'après Ibn Abbas, et en s'étonnant de la beauté de cette parole, il a ajouté : " Mudjahid a appris cette phrase d'Ibn Abbas, que Malik a lui-même reprise de Mudjahid, formule devenue célèbre depuis Malik ".

    J'ajoute : Puis l'Imam Ahmad l'a reprise comme l'a dit Abu Dawud dans Masail-ul-Imami Ahmad (p.276) : " J'ai entendu Ahmad dire : il n'est pas une personne sans que ses paroles soient adoptées ou rejetées, excepté le Prophète (SAW) " (Retour)

    (9) Ibn Hazm a dit : " Les juristes et savants que l'on imite aujourd'hui interdisent eux-mêmes l'imitation aveugle et l'ont interdite à leurs élèves. Et le plus stricte à ce sujet est sans aucun doute l'Imam Shafi'i (RA), car il a sévèrement insisté sur le fait de suivre les hadiths authentiques et d'accepter les preuves indubitables , insistance que personne n'avait atteinte avant lui. De plus, il s'est désolidarisé de toute personne voulant l'imiter dans tout ce qu'il a dit et fait, et l'a déclaré publiquement. Qu'Allah nous fasse profiter de la science de cet homme, et qu'Il lui augmente sa récompense, car il a été la cause d'un grand bien. " (Retour)

    (10) Rapporté par El-Hakim avec sa propre chaîne de transmission jusqu'à l'Imam Shafi'i. Voir Tarikh Dimachq de Ibn Assakir (V.15, Ch.1, p.3), de même que I'lam-ul-Muwaqqi'in d'Ibn-ul-Qayim (V.2, p.363-364) El-Iqadh de El-Fullani (p.100) (Retour)

    (11) Rapporté par Ibn-ul-Qayim (V.2, p.363-364), et El-Fullani (p.68) (Retour)

    (12) Rapporté par El-Harawi dans Dhammul-Kalam (V.3, Ch.1, p.47), El-Khatib dans El-Ihtidjadj bi-Shafi'i (V.8, p.2), Ibn Assakir (V.15, Ch.1, p.9), Nawawi dans El-Madjmu' (V.1, p.63), Ibn-ul-Qayim (V.2 p.361), El-Fullani (p.100). La seconde version est rapportée par Abu Na'im dans El-Hulia (V.9, p.107) (Retour)

    (13) Rapporté par Nawawi dans El-Medjmu' , Cha'rani (V.1, p.57), citation qu'il a emprunté à El-Hakim et El-Beyhaqi. Rapporté aussi par El-Fullani (p.107). Cha'rani a dit en citant Ibn Hazm : " que le hadith soit authentique à ses yeux ou aux yeux d'autres savants " Dans le même ordre d'idées, Nawawi a dit : " Beaucoup parmi nous autres Shafi'ites ont adopté ce comportement, comme pour le fait de dire : " la prière est meilleure que le sommeil " lors du premier appel à la prière du matin, ou l'intention conditionnelle de pèlerinage pour la personne malade, et cela est connu dans les livres de l'Ecole Shafi'ite. Parmi les savants de notre Ecole qui ont délaissé l'avis de Shafi'i pour un hadith authentique, on dénombre Abu Ya'kub El-Buwaiti, Abul-Qasim Ed-Dariki, et l'Imam El-Beyhaqi ,savant du hadith affilié à l'Ecole Shafi'ite. En outre, il y avait un groupe parmi les premiers adeptes de Shafi'i qui, lorsqu'il était confronté à un cas juridique à propos duquel il existait un hadith authentique, alors que l'avis de Shafi'i était en désaccord avec ce hadith, adoptait le hadith en disant : l'avis de Shafi'i est ce qui est en accord avec le hadith. Le Cheikh Abu 'Amru a dit : " Si un Shafi'ite trouve un hadith qui contredit son Ecole, qu'il vérifie s'il a atteint un niveau d'Idjtihad total, ou partiel concernant la question. Dans ce cas, il a le droit d'adopter le hadith sans considérer si un savant avant lui l'a déjà adopté. Par contre, s'il n'a pas atteint le niveau d'Idjtihad et qu'il n'arrive pas à trouver une raison valable qui lui permette de ne pas appliquer le hadith, il a alors le droit de l'appliquer si un savant autre que Shafi'i l'a adopté avant lui, et cela est une raison valable pour délaisser l'avis de son Ecole " (Nawawi continue et dit :) ceci est un avis bon et sage et Allah est plus savant "

    J'ajoute : mais il reste un troisième cas que Ibn Salah (Abu 'Amru) n'a pas cité et qui est le suivant : si aucun savant n'a adopté ce hadith avant lui ? Takiud-Dine Es-Subki a répondu à cela dans son essai : Explication du sens des paroles de Shafi'i : si le hadith est authentique alors c'est mon opinion (V.3, p.102) : " A mes yeux, il vaut mieux suivre le hadith… et que chacun de nous s'imagine être en face du Prophète (SAW), aurait-on le droit de refuser d'appliquer ce qu'il nous dit ? Je jure par Allah que non ! Et chacun de nous est contribuable en fonction de sa capacité " Pour plus de renseignements sur la question, voir I'lam-ul-Muwaqqi'ine (V.2, p.302 à 370), ainsi que le livre d'El-Fullani nommé El-Iqadh [traduction intégrale du titre de ce livre : Eveil de la pensée des gens clairvoyants, dans le fait de suivre le maître (c-à-d le Prophète (SAW)) des Exilés (Muhadjirun) et des Alliés (Ansars), et mise en garde contre l'innovation répartie dans les villes et campagnes, qui consiste en l'imitation aveugle des Ecoles, encouragée par le fanatisme et la véhémence entre les juristes à travers les générations] car c'est un livre précieux et unique en son genre, qui doit être étudié profondémént et avec réflexion par toute personne aimant la vérité. (Retour)

    (14) Le " vous " désigne ici Ahmad ibn Hanbal (qu'Allah lui fasse miséricorde), élève de Shafi'i. Rapporté par Ibn Abi Hatim dans Adab-u-Shafi'i (p.94-95), Abu Na'im dans El-Hulia (V.9, p.106), El-Khatib dans El-Ihtidjadj bi-Shafi'i (V.8,p.1), Ibn Assakir (V.15,Ch.9, p.1), Ibn Abdel-Bar dans El Intiqa (p.75), Ibn-ul-Djawzi dans Manaqib-ul-Imami Ahmad (p.499), El-Harawi (V.2, Ch.2, p.47) d'après Abdullah ibn Ahmad ibn Hanbal d'après son père d'après Shafi'i. Cette parole est donc authentique. C'est pourquoi Ibn-ul-Qayim a été catégorique dans l'attribution de cette parole à l'Imam Shafi'i dans I'lam-ul-Muwaqqi'ine (V.2, p.325), et El-Fullani dans El-Iqadh(p.152). Ce dernier a ensuite dit en citant El-Beyhaqi : " C'est pour cette raison que Shafi'i s'appuie souvent sur les hadiths dans ses avis juridiques, car il a rassemblé la science des gens du Hidjaz, du Sham, du Yemen, de l'Irak et a adopté tout ce qui était authentique sans aucun favoritisme ou penchant de sa part pour ce que les savants de sa région avaient l'habitude de dire , tant que la vérité lui apparaissait ailleurs. Alors que d'autres avant lui avaient l'habitude de se limiter aux avis des savants de leur région, sans chercher à savoir si l'avis d'autres savants était peut-être plus juste. Qu'Allah nous pardonne et leur pardonne " (Retour)

    (15) Rapporté par Abu Na'im dans El-Hulia (V.9, p.107), El-Harawi (V.1, p.47), Ibn-ul-Qayim dans I'lam-ul-Muwaqqi'ine (V.2, p.363), El-Fullani (p.104) (Retour)

    (16) Rapporté par Ibn Abi Hatim dans El-Adab (p.93) et Abul-Qasim Es-Samarkandi dans El-Amali, ainsi que Abu Hafs El-Muaddib dans El-Muntaqa min El-Amali (V.1, p.234), Abu Na'im (V.9, p.106), Ibn Assakir (V.15, Ch.1, p.10) avec une chaîne de transmission authentique (Retour)

    (18) Rapporté par Ibn Abi Hatim (p.93-94) (Retour)

    (19) Ibn-ul-Djawzi dans El-Manaqib (p.192) (Retour)

    (24) Même si cela va à l'encontre de leur parents ou savants, comme l'a rapporté Tahawi dans Sharhu Ma'anil-Athar (V.1, p.372) et Abu Ya'la dans son Musnad (V.3, p.1317) avec une chaîne de transmission dont les rapporteurs sont dignes de confiance, d'après Salim ibn Abdallah ibn Umar qu'il a dit : " J'étais assis avec Ibn Umar (Qu'Allah l'agrée) dans la mosquée lorsqu'un homme originaire du Sham l'a questionné à propos du repos [tamattu'] entre la 'Umra et le Hadj. Ibn Umar dit alors : c'est une bonne et belle chose. L'homme rétorqua : mais ton père [c.-à-d. Umar ibn El-Khattab] interdisait cela ! Ibn Umar répondit : Malheur à toi ! Si mon père l'a interdit et que le Prophète (SAW) l'a fait et ordonné, prends-tu l'opinion de mon père ou l'ordre du Prophète (SAW) ? Il répondit : l'ordre du Prophète (SAW) ! Ibn Umar lui dit alors : alors va-t-en maintenant ! " Rapporté par Ahmad (hadith n°5700) et Tirmidhi (V.2, p.82 avec Sharhut-Tuhfa ) et il l'a authentifié. Ibn Assakir a aussi rapporté (V.5, Ch.1, p.51)le récit suivant d'après Ibn Abi Dhi'b qu'il a dit : " Un jour Sa'd ibn Ibrahim (le fils de Abderrahamane ibn 'Awf) à répondu à la question d'un homme selon l'avis de Rabi'a ibn Abderrahmane. Je (c.-à-d. ibn Abi Dhi'b) l'informai alors d'un hadith du Prophète (SAW) contredisant cette opinion. Sa'd dit alors à Rabi'a : voici ibn Abi Dhi'b, qui est à mes yeux un homme de confiance, qui vient de m'informer d'un hadith du Prophète (SAW) qui contredit ton opinion. Rabi'a lui dit alors : tu as fais ton Idjtihad et ton jugement est passé . Sa'd s'écria : C'est incroyable ! J'applique le jugement de Sa'd sans appliquer celui du Prophète (SAW) ! Et bien non ! Je rejette plutôt le jugement de Sa'd et j'applique celui du Prophète (SAW). Sa'd demanda alors le manuscrit sur lequel son opinion avait été écrite, le déchira et jugea selon le hadith " (Retour)

    (25) Non seulement est-il pardonné mais en plus il est récompensé selon le hadith authentique rapporté par Bukhari et Muslim et d'autres : " lorsqu'une personne d'autorité (Savant ou gouverneur) fait un effort de recherche, émet un avis et qu'il trouve juste, il aura deux récompenses. S'il se trompe, il n'en aura qu'une. " (Retour)

    (26) Ecrit par Ibn Radjab dans l'explication du livre d'El-Fullani Iqadh-ul-Himem (p.93) (Retour)

    (28) Ibn Abidine dans El-Hachia (V.1, p.62) attribué à El-Kanawi dans En-Nafi'ul-Kabir (p.93) de Abu Hamid El-Ghazali (Retour)

    (29) L'Imam El-Muzni a dit au début de son résumé de jurisprudence Shafi'ite - qui se trouve en marge de Kitab-ul-Umm de Shafi'i - la chose suivante : " J'ai résumé ce livre tiré de la science de l'Imam Muhammad Ibn Idriss Shafi'i (Qu'Allah lui fasse miséricorde) et du sens de ses propos, afin de le faciliter à qui veut l'apprendre, s'il veut l'étudier pour sa religion et se protéger des erreurs, tout en sachant que l'Imam Shafi'i a interdit de l'imiter ou d'imiter un autre que lui " (Retour)

    (30) Il est clairement montré dans cet ouvrage que l'Imam Muhammad a été en désaccord avec Abu Hanifa sur plus de vingt questions que nous énumérons ici :42, 44, 103, 120, 158, 169, 172, 173, 228, 230, 240, 244, 274, 275, 284, 314, 331, 338, 355, 356. Voir Et-Ta'liq-ul-Mufid qui est l'explication du Muwatta de l'Imam Muhammad . (Retour)

    (31) Ibn 'Abidine dans El-Hachia (V.1, p.74) et Rasmul-Mufti (V.1, p.17), El-Kurachi dans El-Djawahir-ul-Mudia fi Tabaqat-il-Hanafia (p.347) en disant : " C'était un homme de confiance, connaissant la science du hadith. Lui et son frère Ibrahim étaient les deux plus grands Cheikhs de Balkh en leur temps ". (Retour)

    (32) Voir El-Fawa'id-ul-Bahia fi Taradjum-il-Hanafia (p.116) (Retour)

    (34) Voir El-Fawaid (p.116) dont l'auteur a dit très justement : " Partant de cela, il apparaît clairement la fausseté de la parole de Makhul qu'il attribue à Abu Hanifa : " Celui qui lève les mains pendant la prière, sa prière est annulée ", parole par laquelle El-Amir Katib El-Atqani s'est laissé abusé, comme on le voit dans sa biographie. En effet, 'Isam ibn Yusuf faisait partie des disciples assidus de Abu Yusuf, devant lequel il levait les mains pendant la prière. Si effectivement la parole attribuée à Abu Hanifa s'avérait avoir eu quelque authenticité, Abu Yusuf et 'Isam l'auraient su. On peut en déduire aussi que si un Hanafite délaisse l'opinion de l'Imam à cause de la puissance de la preuve d'un autre Imam, cela ne le fait pas sortir de l'Ecole Hanafite, bien au contraire ! Le fait de délaisser l'imitation pour une preuve puissante n'est que fidélité à l'Imam… ne vois-tu pas que 'Isam ibn Yusuf a délaissé l'avis de Abu Hanifa dans le fait de ne pas lever les mains pendant la prière, et que malgré cela il est quand même considéré comme un hanafite ? Et je me plains auprès d'Allah contre les ignorants de notre époque qui critiquent celui qui délaisse l'imitation de son Imam sur une question en raison d'un dalil puissant jusqu'à le faire sortir de l'Ecole à laquelle il appartient ! ? Mais cela n'est pas étonnant de leur part car ils font partie de la populace…le plus étonnant est quand cela émane de personnes voulant ressembler aux savants mais qui en fait les imitent comme du bétail ! " (Retour)

    (36) Pour plus de détail voir El-Ihkam fi Usool-il-Ahkam d'Ibn Hazm et Hudjatullah-il-Baligha de Dahlawi, ou son essai sur ce sujet : 'Aqd-ul-Djid fi Ahkam-il-Idjtihadi wat-Taqlid (Retour)

    (37) Voir Feidh-ul-Qadir de El-Manawi (V.1, p.209) et Silsilat-ul-Ahadithi Ed-Da'ifati wal Mawdu'a (V.1,p.76-77) (Retour)

    (42) Voir El-Intiqa d'Ibn Abd-il-Bar (p.41) et Kachf-ul-Mughetta fi Sharh-il-Muwatta (p.6-7) d'Ibn Assakir, et Tadhkirat-ul-Huffadh del'Imam Dhahabi (V.1, p.195) (Retour)

    (43) Voir le chapitre 8 du livre Ma La Yadjuzu Fih-il-Khilaf (p.65-72) où plusieurs exemples sont cités, quelques-uns parmi eux émanant de certains savants d'El-Azhar ! (Retour)

    (44) Voir El-Bahru-Raiq (Retour)

    (45) Mais je dis aujourd'hui : les nombreux derniers écrits de El-Ghazali - comme son livre qui a été publié dernièrement dont le titre est : " La Tradition Prophétique (Sunna), entre les Gens du Fiqh et les Gens du Hadith " - on révélé qu'il faisait lui-même partie de ces gens qui appellent à l'Islam et " qui sont eux-même dans le désarroi " ! Et nous avions déjà ressenti auparavant - à travers quelques-unes de ses paroles et de la discussion que nous avons eu de certains de ses points de vue de Fiqh, ainsi qu'à travers quelques-uns de ses écrits et ouvrages - ce qui révélait ce désarroi, sa déviance de la Sunna, son habitude de prendre sa raison comme juge à propos de l'authenticité d'un hadith ou de sa faiblesse , car à ce sujet, il ne retourne pas à la science du hadith et à ses règles, ni aux connaisseurs et spécialistes dans ce domaine, mais plutôt il authentifie ce qui lui plaît, même si le hadith est faible ! Et ce qui ne lui plaît pas, il le considère comme faible, même s'il est authentique et que Bukhari et Muslim sont unanimes là-dessus ! Comme tu verras cela clairement dans ses remarques à propos de l'introduction que j'avais rédigée et introduite dans son livre " Compréhension de la Vie du Prophète (Fiqh-us-Sira)" concernant mon analyse des hadiths que ce livre contient, dans sa quatrième édition. Et cela a été réalisé à sa demande - par l'intermédiaire d'un de nos frères de El-Azhar - chose que je me suis empressé d'accomplir, car je pensais en ce temps-là que cela venait de son intérêt pour la Sunna et pour la Biographie du Prophète, et de son engouement pour sa protection de toute chose lui étant étrangère… Et bien qu'il ait fait l'éloge de mon analyse, et qu'il ait clairement déclaré son contentement à ce propos, comme on le voit dans ses remarques mentionnées ci-dessus - sous le titre " A propos des hadiths de ce livre " - il a tout de même clarifié sa méthodologie quant à son acceptation des hadiths faibles , et son rejet des hadiths authentiques, en se contentant d'analyser par la raison son contenu. Par cet acte, il fait ressentir au lecteur que l'analyse scientifique n'a absolument aucune valeur à ses yeux , étant donné que cette analyse peut toujours être sujette à la critique théorique personnelle, qui diverge grandement d'une personne à une autre. Car ce qui peut être accepté par l'un peut être rejeté par l'autre, et vice versa… Et c'est ainsi que la religion devient suivi de passions, sans limites et sans règles si ce n'est l'observation personnelle, ce qui est contradictoire avec la position des Savants de tout temps : la chaîne de transmission fait partie de la religion. Chaîne de transmission sans laquelle n'importe qui aurait pu dire ce qu'il veut… Et c'est ce que El-Ghazali -qu'Allah le guide- a fait avec beaucoup des hadiths de sa " Biographie du Prophète ". Car bien qu'une grande partie du contenu de son livre ne soit que des hadiths Mursal (Chaîne tronquée au niveau du Tabi'i) et Mu'dal (Chaîne de transmission à laquelle il manque 2 maillons d'affilé), et qu'une partie des hadiths qui ont une chaîne de transmission continue sont faibles -comme on voit cela clairement à travers mon analyse - malgré tout cela, le voici qui ose s'enorgueillir sous le titre précité en disant :

    " J'ai fait mes efforts pour suivre la méthodologie correcte, et pour me baser sur les sources respectables, et je pense avoir effectué à ce niveau un bon travail. Et j'ai rassemblé parmi les récits ce qui permettra au savant clairvoyant d'être rassuré " !

    Voilà ce qu'il a dit ! Et si on lui avait demandé : sur quelle règle t'es-tu basé dans tes efforts ? Est-ce les bases de la science du hadith -qui est la seule voie permettant de connaître l'authentique de la Biographie du Prophète - ? Sa réponse ne pourrait être que le fait de s'être appuyé sur son observation personnelle, méthode dont la fausseté a déjà été démontrée… Et la preuve de cela est son authentification de hadiths dont la chaîne de transmission n'est pas authentique, et son rejet de hadiths dont la chaîne de transmission a été authentifiée par Bukhari et Muslim en personne, chose que j'avais déjà clarifiée dans l'introduction citée plus haut, et qu'il avait inséré au début de son ouvrage " Fiqh-us-Sira " (Quatrième Edition), et qu'il a retiré -hélas !- des éditions suivantes comme l'édition de Dar-ul-Qalam à Damas, et d'autres encore ! Chose qui a poussée certaines personnes à croire que sa demande précitée ne venait pas de lui, si ce n'est pour la diffusion de son livre dans la masse des lecteurs qui reconnaissent l'effort de ceux qui servent la Sunna, qui la protègent, et qui différencient l'authentique du faible selon les règles scientifiques, et non pas selon les observations personnelles et les différentes passions, comme l'a fait El-Ghazali, qu'Allah le guide, dans ce livre, et dans son livre plus récent : " La Sunna Prophétique, entre les gens du Fiqh et les gens du Hadith ", à travers lequel il est apparu aux gens comme étant de méthodologie mu'tazilite, n'ayant aucun égard envers les savants du hadiths et leurs efforts titanesques tout au long des années pour servir la Sunna, et pour différencier l'authentique du faible. De la même façon, il n'a aucun égard envers les efforts des Juristes (Fuqaha) pour mettre en place ces bases, et leurs embranchements, car il choisit celles qu'il veut et délaisse celles qu'il veut sans aucun lien avec une de leurs bases ou de leurs embranchements ! Et beaucoup parmi les gens de la Science et du Mérite, qu'Allah les récompense, lui ont répondu, et ont clairement démontré son désarroi et sa déviation, et parmi les meilleures réponses qu'il m'ait été donné de lire se trouve celle de notre ami le Docteur Rabi' Ibn Hadi El-Madkhali dans le magazine afghan " El-Mudjahid " (n°9 à 11), ainsi que le pamphlet de notre illustre frère Salih Ibn 'Abdelaziz Ibn Muhammad aali Sheikh, dont le titre est " El-Mi'iar Li'Ilmi El-Ghazali ". (Retour)

    (46) Bukhari et Muslim (Retour)

    (47) Bukhari et Muslim. Voir le contexte du hadith et son analyse dans Silsilat-ul-Ahadithis-Sahiha (n°121) (Retour)

 

 

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